Interview- Tryo au Cirque d’Hiver

Pour conclure une tournée commencée en 2016, Tryo a choisi la salle atypique du Cirque d’Hiver. Mamusicale était présent et heureux d’assister, jeudi 28 septembre, à cet événement, qui a permis à Tryo d’offrir à son public un spectacle mêlant optimisme, chansons engagées, moments de partage, rêves et arts du cirque.

À cette occasion, Mamusicale a pu interviewer l’un des membres emblématiques du groupe, Guizmo. 

Vous venez de passer une année en tournée, comment s’est-elle déroulée ? Avez-vous une anecdote à partager ?

La tournée a commencé l’année dernière, à l’été 2016. Suite aux attentats, nous avons commencé à nous revoir avec Tryo. Nous avions quelques chansons que nous voulions porter sur scène. Et surtout une vraie envie de retrouver les gens pour ne pas rester chez nous cet été là ! Nous avions aussi envie de nous redécouvrir d’autant que les élections approchaient et que les messages qui nous parvenaient disaient que la jeunesse se transformait en jeunesse Front National. Ces éléments nous ont vraiment donné l’envie d’aller jouer et d’en profiter pour tester de nouvelles chansons. À la suite de ce début de tournée, nous avons enregistré un nouvel album et nous sommes repartis sur les routes juste après la sortie de l’album. Nous en sommes aujourd’hui à environ 130 dates depuis l’été dernier donc on peut dire que la tournée a été très intense !

Il y a eu plein d’anecdotes, dont une particulièrement sympa. C’était l’année dernière pendant un festival, nous avons eu le droit à une naissance pendant le concert. Un petit Aaron est né derrière la scène et du coup a reçu son pass pour assister à vie aux concerts de Tryo ! (rires)

Comment la tournée a-t-elle été reçue par le public ?

Je crois que nous avions tous besoin de faire la fête, d’expulser tous ces sentiments négatifs et de retrouver des valeurs d’ouverture, de partage et de vivre ensemble. C’est ce que nous avons essayé de porter dans notre album « Vent Debout », une révolte optimiste, mêlant rêve et utopie.

Nous avons tourné pendant toute la période présidentielle et tenions à apporter nos messages, comme « sous les drapeaux » et l’idée de « nuit debout », c’est-à-dire que le citoyen reprend la parole et sa place dans le monde politique. Tous ces éléments ont fait partie de notre tournée donc je crois que nous avons été bien accueillis et nos concerts ont été assez joyeux et festifs. Ça a été une tournée très intense et plaisante.

Vous terminez votre tournée au Cirque d’hiver : qu’est-ce que ce lieu évoque pour vous et pourquoi l’avoir choisi pour votre final ?

Le cirque d’hiver est un vieux délire pour Tryo, nous en parlons depuis plus de 10 ans. Nous l’avions à un moment envisagé puis reporté. C’est une salle complètement mythique, avec une scène en rond et centrale, qui permet de jouer très proche du public. C’est une autre manière de concevoir le spectacle que nous avions initié avec les spectacles au Cabaret Sauvage, où nous étions situés au milieu du public sur une scène surélevée. Au Cirque d’Hiver c’est l’inverse, nous sommes en bas et le public est autour et au-dessus de nous. C’est vraiment un lieu très particulier et magique, qui me rappelle des souvenirs d’enfance, comme les sorties au cirque avec les grands-parents. Aujourd’hui nous aimerions que le cirque évolue et qu’il s’affranchisse des animaux. Nous porterons certainement ce message au milieu du cirque Bouglione, pour rappeler que les animaux de cirque ne sont pas les mieux lotis.

Avez-vous l’impression que votre public a évolué avec vous ou que vous touchez un public plus vaste ?

C’est une bonne question. Je sais que nous avons une base de fans qui existe depuis toujours. Il y a des Tryophiles qui nous suivent depuis des années et qui ont monté des réseaux sur internet. Et en même temps, il y a toute une jeunesse qui écoute Tryo en ce moment, une nouvelle génération qui découvre le groupe. Il y aussi ceux qui ont décroché, qui sont passés à autre chose.

J’ai envie de dire qu’il y a un peu de tout, nous avons la chance d’avoir un public très large, des jeunes enfants qui viennent avec leurs parents et des soixante-huitards qui y trouvent aussi leur compte. C’est vraiment notre fierté d’avoir un groupe très hétéroclite, de toutes religions et générations.

Est-ce de plus en plus difficile de faire un nouvel album, de trouver des nouveaux thèmes pour élaborer vos textes et d’essayer de surprendre encore votre public ? 

Il y a des périodes en fait. En ce moment, nous ne sommes pas dans une période d’écriture mais dans une phase de spectacle. Nous nous concentrons sur les dernières dates. Nous avons toujours de nouvelles sources d’inspiration et encore plein d’histoires à raconter, même sur des thèmes déjà abordés. L’important dans une chanson c’est la manière d’aborder le sujet et de savoir comment nous allons traiter l’écologie, le vivre ensemble, l’amour et la fête…

Nous avons aussi la chance d’être trois auteurs compositeurs dans le groupe, donc nous disposons d’un panel de textes et de chansons très différentes et variées.

En somme, l’écriture naît du voyage, de la littérature, des rencontres, des discussions, de ce qui nous entoure et de la vie que nous croquons à pleines dents ! (rires) 

Qu’est-ce que vous pensez de la scène musicale française aujourd’hui ? Est-ce que vous avez des coups de cœur ?

Bien sûr ! Pour Claudio Capéo avec qui nous allons chanter en duo pendant les concerts au Cirque d’Hiver. C’est une belle découverte.

Il y a aussi Gauvain Sers, un chansonnier qui a réalisé plusieurs premières parties sur les concerts de Tryo et qui a ensuite tourné avec Renaud en l’accompagnant dans tous les zéniths. C’est un jeune talent dont nous allons entendre parler.

Je pense aussi à BigFlo & Oli, à toute cette nouvelle génération : Biga Ranx, Naâman, cette jeunesse qui débarque dans le reggae. Il y a plein d’autres groupes que nous apprécions comme les Ogres de Barback, La rue Ketanou, Le pied de la Pompe ou encore Ali.

Vous faites appel à de nombreux artistes pour réaliser vos premières parties. Quelle importance accordez-vous à ce mode de visibilité et dans quelle mesure intervenez-vous dans le choix des artistes ?

Avec Tryo, nous mettons depuis longtemps un point d’honneur à faire découvrir de jeunes artistes. Nous avons présenté Tété, Olivia Ruiz ou encore Camille, des artistes peu connus à l’époque et qui ont ensuite connu de superbes carrières. Nous avons toujours été d’humeur curieuse.

Mali s’occupe de la mise en scène au Chantier des Francos à la Rochelle, ce qui lui permet de découvrir beaucoup de nouveaux talents et de nous les faire partager. Je pense notamment à Boulevard des Airs, un groupe qui nous a beaucoup accompagnés pour nos premières parties.

Donner leur chance à de nouveaux talents fait partie de nous. Nous aussi, nous avons réalisé des premières parties de Burning Spear ou de groupes de rock que nous aimions bien. Aujourd’hui, nous rendons la monnaie de notre pièce, comme on dit. Et en même temps nous nous enrichissons en découvrant de nouveaux artistes. Nous nous remplissons de ces rencontres. Le partage et la rencontre font partie de la genèse du groupe.

Quelles sont vos sources d’inspiration ? Quel type de musique aimez-vous écouter et quels groupes vous inspirent toujours ?

Avec les quatre membres de Tryo, ça va de la musique pop-rock à la chanson française en passant par le jazz et le métal. Je crois qu’il n’y a pas de tabou dans la musique, on écoute ce qui nous fait du bien aux oreilles. Nous nous sommes inspirés de beaucoup de styles avec Tryo, de la musique indienne, du rock, du reggae et de la chanson française. Tout est bon à prendre.

Aujourd’hui, avec l’expérience, vous sentez-vous plus sages ou plus révoltés qu’à vos débuts ?!

Je pense que les valeurs n’ont pas changé et c’est sûrement ce qui fait que nous sommes encore ensemble après 22 ans. Nous partageons des valeurs communes, comme la volonté de partager, de vivre ensemble et l’écologie. Nous défendons ces sujets-là depuis toujours.

Aujourd’hui, nous avons des enfants, de l’expérience, nous avons la chance de voyager et de faire des rencontres, notre révolte ne s’exprime donc pas de la même façon. Il y a 20 ans, nous écrivions des chansons comme « Regardez-les », aujourd’hui nous serions plutôt amenés à nous rapprocher d’associations et à participer. Les choses évoluent. Mais il y a toujours beaucoup de révolte, d’indignation et en même temps d’optimisme, de rêve et d’utopie. Nous essayons de porter tous ces sujets.

Nous sommes dans un mode révolté dans le sens où nous soutenons des associations comme Sea Sheperd ou Green Peace. Leurs membres sont dans l’action et bataillent pour que les choses changent et avancent. Donc nous sommes plutôt dans ce camp là.

Dernière question, quels sont vos projets après la tournée ?

Une bonne sieste ! (rires)

Nous allons nous poser un petit peu, parce que ça va faire une grosse année et demie que nous sommes sur les routes.

Nous allons nous remettre à l’écriture et à d’autres projets. Manu travaille sur un hommage à Frank Zappa, Mali va retourner à ses projets de mise en scène au Chantier des Francos, et moi je pense me remettre à travailler sur un prochain album avec le Collectif 13.

Avec Tryo, nous allons aussi nous revoir au mois d’octobre pour décider ce qui va se passer par la suite. En général, nous prenons toujours un petit break après les tournées pour respirer un peu avant de nous y remettre. Donc pas de mot d’ordre précis pour le moment.

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