Buridane, de la transition d’une artiste à la mue d’une femme

On a attendu avant de pouvoir découvrir le nouvel album de Buridane. Et quelle ne fut pas notre surprise. Des chansons ciselées, une écriture profonde, rythmée qui nous touche et que l’on prend plaisir à écouter. July (alias Buridane) dévoile pour Mamusicale Barje Endurance, son nouvel opus.

Buridane bonjour, 

Bonjour 

Tu viens de sortir ton deuxième album Barje Endurance ce 6 octobre, comment te sens-tu ?

Je suis soulagée (rires). Porter un disque dans son ventre pendant quasiment 5 ans c’est long. Il était tant que ça sorte donc je suis contente.

Ce nom d’album confronte deux mots et deux entités fortes qui viennent d’une réflexion profonde de ta part ?

Deux mots extraits de la chanson A l’Aube. L’un représente la folie, plutôt dans l’éther, l’autre la ténacité qui est ancré, très terrien. Cela résume bien la globalité de l’album car il s’interroge sur beaucoup de sujets et notamment jusqu‘où on est capable d’endurer des situations inconfortables dans le but de se dépasser ? Et quelle est la frontière entre se dépasser et s’abimer ? C’est floue et miscible. Je pose la question également de savoir comment on subit ?  Dans quelle mesure le monde extérieur influe ou pas notre monde intérieur car je crois que c’est la société qui fabrique un peu qui on est et ce qu’on traverse.

C’est une réflexion individuelle mais qui se place dans un positionnement global ?

C’est la première fois que c’est ainsi, il y a un parallélisme fort, les questions se répondent d’un monde à l’autre. Et cela amène des constats fascinants.

Est-ce que tu conçois ces nouvelles chansons comme des témoins de notre temps ?

Je ne pensais pas en ces termes mais oui très clairement. C’est la réflexion de quelqu’un qui vit en 2017, en France, à 32 ans et qui se demande que faire avec ce qu’on voit … Qu’est-ce qu’on fait pour le futur ? Qu’est-ce que l’on garde du passé ? Et surtout qu’est-ce qu’on fait dans le présent ? Il y a beaucoup de gens perdus et de personnes qui tentent des choses. C’est une période à la fois excitante et aussi très décourageante parfois.

Ce côté barje est une nécessité face à notre monde parfois trop normé ?

C’est nécessaire, ça manque même. C’est volontairement un mot extrême car quand on me voit je n’ai pas l’air d’une Brigitte Fontaine ou d’une Camille qui ont toutes les deux une belle folie. En fait, c’est une rébellion contre le lisse et le normé. C’est une volonté d’être loin de tout ce qui est parfait et c’est parfois difficile de s’accepter comme on est dans un monde qui veut la perfection.

Tu débutes ce nouvel album par la chanson Transition, quand on connait un peu ton parcours on comprend que ce n’est pas un choix anodin ?

C’est complètement voulu (rires). D’abord, c’est la première chanson que j’ai écrite. Pour moi il n’y avait pas d’autre ouverture possible déjà par l’atmosphère musicale qui permet d’amener les gens dans quelque chose de plus personnel, et aussi par le fait que ce soit parlé, comme un témoignage. Cela transcende les dimensions de l’intime, du professionnel et du monde qui m’entoure.

L’Homme est le personnage central de cet album, l’humain avec son regard, ses émotions, ses sentiments face à des instants parfois sombres ?

Oui notamment avec la chanson Bleu. C’est la première fois que je suis confrontée au deuil d’une personne proche et cela m’amène à me demander ce que représente cette absence. C’est difficile d’en parler … Perdre quelqu’un ce n’est pas seulement être triste ça peut aussi réveiller des choses et se demander ce que l’on perd de soi. Ça amène également à regarder en face et voir comment la mort peut faire venir ou revenir vers nous certaines personnes. Mais est-ce profond ou juste émotionnel de la part de ces gens ? C’est un constat qui me pose question.

La musique accompagne tes mots, mais elle se confronte aussi à eux et cela permet d’avoir une seconde écoute de tes morceaux, tu le penses ainsi?

Je ne m’en rends pas compte mais ce que je voulais faire c’est une musique qui soit une autre proposition de lecture et un deuxième point de vue artistique.

Sur cet album, on découvre une Buridane proche du slam, du rap. On retrouve l’importance du verbe avec un jeu rythmique entraînant l’impact des mots et la résonance du propos, c’est une nouvelle direction prise ?

Effectivement, j’ai eu un désir d’être de plus en plus précise, de dire de façon essentielle les choses et moins contourner.  Si on regarde bien, beaucoup de chansons sont courtes. Ce n’est pas une volonté de départ mais je crois que c’est lié à cette idée de dire simplement ce que je ressens et ce que je vis. Je le pense comme un cheminent qui se fait un peu tout seul. Cela fait quelques années que le rap m’intéresse, je n’en ai pas une grande culture mais certaines choses me touchent. Et puis, le travail autour de la voix parlée c’est quelque chose que je fais car je prête ma voix pour des audio-guides dans les musées et j’apprécie vraiment ce travail d’une voix au service d’un texte. Cela n’a pas le même effet qu’une chanson dans laquelle on rajoute une mélodie etc …

La voix parlée a un véritable impact et donne du sens à des mots qu’on n’aurait pas forcement dans une chanson ?

Oui voix parlée et chantée c’est différent. Une voix c’est très vivant, il y beaucoup d’informations dans une intonation, un grain de voix …

Cette envie de rap, de slam vient d’un côté plus urbain qui nous entoure et qui rythme notre quotidien parfois ?

C’est peut être un souci de vouloir faire une chanson française moderne qui n’est pas d’une vieille école que pourtant je peux aimer écouter. Et puis, c’est un truc que j’apprécie comme danser sur du hip hop, j’aime le mouvement que ça entraîne, j’aime les sonorités des basses et le groove de ces styles.

Est-ce que tu as pu ressentir plus de liberté dans la création de cet album plutôt qu’avec le précédent ?

Oui complètement, déjà par les arrangements qui m’ont fait composer autrement. Avant j’étais souvent à la guitare. Pour cet opus, j’ai débuté par des boucles de batterie, des sessions rythmiques pour me sortir de ma pulse naturelle de guitare. Le travail rythmique m’animait vraiment. Et je dois dire que je suis dans un label qui m’a complètement fait confiance et cette liberté est géniale !

Cet album Barje Endurance est un cheminement avec deux parties je trouve. La première portée par cette texture des mots slammés et une seconde qui revient à l’artiste de chanson en guitare voix, tu conçois ce cheminement également ?

Oui on est toujours un peu ambivalent et on n’abandonne pas facilement ses premières amours. Cette fin d’album évoque les concerts en solo, le côté intimiste guitare voix de départ et cela montre aussi qu’on peut osciller entre quelque chose d’épuré mais aussi plus dansant et puissant et ça peut cohabiter.

Tu termines ton album par le titre A l’Aube, justement quelle est cette aube pour Buridane ?

Je pense que l’aube c’est ce disque. C’est la fin d’un cycle large de création, de vie intime qui aboutit à cet opus. C’est aussi une ouverture sur l’inconnu, en s’interrogeant sur ce qu’on va vivre après avec ces chansons ?

Et bien justement on va se projeter alors car quelques concerts sont déjà annoncés …

Oui ! Je serai le 10 novembre à Toulouse, le 14 à la Maroquinerie à Paris, le 17 à Lyon, le 18 à Thionville et début décembre à Annemasse.

Comment se fait le lien de l’album vers le live ?

On a une formule  qui permet de passer de quelque chose de très épuré et folk à une autre plus puissante avec un batteur, un claviériste et un saxophoniste. Ce dernier amène d’ailleurs des parties très organiques. On va jouer l’intégralité de ce nouvel album, ré-interpréter 2-3 titres du premier opus et puis peut-être une reprise car ça fait du bien de dire « ah ça je connais, ça me dit quelque chose » et le tout dans une belle énergie.

Merci beaucoup Buridane d’avoir passé ce moment avec nous, belle route et à très bientôt.

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