Rencontre avec Boostee : l’autoproduction moteur de son ambition.

A l’occasion de son concert à la Maroquinerie ce 11 décembre dernier, nous avons pu rencontrer Boostee, un artiste qui aime se lancer des défis. Le jeune rappeur revient sur sa musique, sa tournée et sa carrière professionnelle dans une interview accordée à Mamusicale. 

Dans une de tes chansons, tu dis « être fier du deuxième album », qu’est-ce que MAD a de plus que Bluesky ?

J’étais fier aussi de Bluesky. Il n’a rien et tout de plus. Il s’est passé 2 ans entre les deux et j’ai eu le temps de savoir ce que je voulais vraiment artistiquement. Pour le premier album, j’ai repris ce que j’avais commencé à faire il y a deux, trois ans pour sortir l’album le plus vite possible. J’ai quand même pris mon temps parce que j’ai sorti mon premier album 1 an après Feel Alone. Et pour le deuxième, je me suis laissé deux ans. Je suis fier de l’album et fier de moi parce que je ne suis pas allé là où on m’attendait forcément mais là où je moi je voulais. Quand je vois les retours, les gens qui chantent en concert, pour moi c’est gagné. Je suis content d’être allé au bout de ce que je voulais moi, et je pense que c’est pour ça que je suis aussi fier de l’album.

Est-ce que tu regrettes ta « Vie d’Avant » ?

Je ne regrette pas du tout. Je suis nostalgique de ma vie d’avant mais elle ne me manque pas. Être nostalgique, c’est pas forcément être triste. Je sais que si demain je change de vie, je serais nostalgique de cette vie-là. C’est toujours un paradoxe : on veut ce qu’on n’a pas. La nostalgie, c’est une émotion très importante qu’il faut garder et ça fait partie du « cocktail du bonheur ».

Tu parles beaucoup de célébrité dans cet album. As-tu peur de t’y perdre un jour ?

Bien sûr la célébrité me fait peur. Mon idéal serait vraiment de rester comme je suis aujourd’hui. Avoir la chance de pouvoir faire des tournées, vendre des albums, avoir une fanbase. Mais j’ai quand même une vie tranquille. Quand je suis en soirée on me reconnaît mais sans excès, c’est toujours contrôlé. Pour moi, c’est l’excès qui devient dangereux. Après, je dis pas que j’en veux pas plus car j’ai de l’ambition. Mais ça commencera à me faire peur à partir d’un certain stade où on ne contrôle plus les choses. Je serais incapable de ne plus être maître de ma propre vie.

Un souvenir marquant d’un « samedi soir » ?

Olala ! Il en a plein ! Je suis souvent avec les mêmes personnes : Alexandre, Simon Baty, Arthur, mes meilleurs potes. On se voit très souvent, on est très sectaires. C’est avec eux que j’ai vécu mes meilleurs samedi soirs.

Pourquoi as-tu eu envie d’écrire la chanson « Papy » ?

J’en avais fait dans les Boostee Monday, au début. C’est venu tout seul, je ne me suis posé aucune question. J’ai écrit sans barrière. Je ne voulais pas en faire un hommage, je voulais juste lui parler, être franc. J’ai écrit le texte en 15 minutes, c’est le plus rapide de l’album. Je n’ai rien retouché. Ce n’était pas pensé, c’était juste sincère, naturel et sain.

Dans l’album, les paroles sont plutôt nostalgiques et les prods sont très rythmés. Pourquoi un tel contraste ?

Parce que je pense que c’est le contraste que j’ai. Je suis nostalgique mais je ne m’y perds pas. J’adore repenser aux choses que j’ai vécues mais ça ne m’empêche pas d’avancer. C’est exactement ce que je veux retranscrire dans les chansons. On a tous une petite nostalgie mais il faut s’en servir comme une force. J’adore vraiment ce contraste.

Comment Camille Cerf s’est-elle retrouvée dans le clip de « Sereinement » ?

En prenant une voiture en allant au studio…. (rires).

Quand j’ai écrit ce texte là, avec Ninovella, on ne voulait pas du tout prendre parti sur quoi que ce soit. Je ne voulais pas insister sur les paroles mais plutôt sur le clip. Pendant que j’écoutais le son, j’étais sur les réseaux sociaux et je voyais Camille Cerf en train de se débattre avec ses détracteurs. Elle avait fait un gros post sur ça. Une semaine après, je lui envoie un message avec le son en lui disant que si elle se sent concernée, je serai super heureux de l’inviter dans le clip. Elle et me donne son accord. Dans le clip je voulais insister sur le fait que les femmes sont très régulièrement remises en question. Camille Cerf représente bien la femme féminine en France et on voulait la mettre en valeur, sans en faire trop. Pour ceux qui connaissaient l’histoire de Camille Cerf, ils savaient qu’elle avait vécu des galères et pouvaient faire le lien. Elle a donné de la force a mon clip, et inversement elle a trouvé de la force dans mon morceau. C’est exactement le but d’une collaboration.

Qu’est-ce que tu ressens à l’approche de la fin du MAD Tour ?

Plein de choses. De la fierté d’abord parce que je l’ai fait tout seul. J’avais pas envie de repartir avec une boîte de prod. C’était vraiment un défi personnel de me dire qu’après 2 albums sortis dans mon propre label, j’avais envie de monter une tournée. La satisfaction est dingue. J’étais au cœur de tout, et j’ai aussi découvert à quel point c’est compliqué, c’est un travail à part entière ! Mettre les dates en place, travailler avec l’équipe, voir que certaines dates étaient complètes, c’est hyper gratifiant. La seule chose que je retiens de tout ça, c’est que c’est une fierté incroyable. Le faire moi même ça m’a donné une vraie raison de monter sur scène.

As-tu prévu de prolonger la tournée l’année prochaine ?

Bien sûr. On va prolonger le MAD Tour l’année prochaine !

As-tu “bâti ton empire de tes propres mains” ?

Il y a encore beaucoup de chemin à faire mais c’est un bon départ. 

Qu’est-ce que t’as apporté la création de ton label ?

Quand j’ai commencé la musique, j’ai toujours fait les choses moi-même. J’ai fait mes premiers concerts à 16 ans. Quand ça a commencé à marcher un peu plus, on m’a laissé l’opportunité de garder mon label et de rester producteur. Aujourd’hui, je peux mettre d’autres choses en place, dont mes deux albums et la tournée. Rester producteur c’est aussi rester indépendant. Je peux travailler avec d’autres artistes.

Conseillerais-tu à des artistes en développement de faire pareil ?

À 100%! Surtout maintenant. Je pense que des labels comme les majors sont importants, moi par exemple j’ai un contrat un peu spécifique chez Polydor. Ils interviennent pour la distribution etc. Mais quand on commence, il faut absolument créer son propre label et garder le contrôle car ça peut devenir compliqué quand tu délègues trop. Tu peux fermer les yeux, c’est sûr, mais tu ne sais pas ce qui se passe. Si dès le départ, tu acceptes de te battre tous les jours, tu sais exactement où tu en es. Au début, on se prend des murs mais on apprend et au bout d’un moment on maîtrise. Moi c’est ce que je conseille.

Il me semble que tu travailles avec ton père et ta sœur notamment. Comment se passe le travail en famille ?

Mon père m’a permis de me lancer c’est à dire qu’il était là pour moi, il m’a fait bosser quand j’étais plus jeune pour que je puisse avoir de l’argent pour aller en studio, louer mes premières salles, pouvoir faire mon premier EP. Il était là au tout début, il l’est encore aujourd’hui mais il n’est pas officiellement dans mon label. Ma grande sœur bosse avec moi, elle est la gérante de Bluesky Family. Et ma petite sœur est chanteuse, elle fait mes premières parties. On va bientôt la signer officiellement dans le label aussi.

N’est-ce pas trop difficile de distinguer vie privée et vie professionnelle ?

Non. Quand on taff, on taff. C’est hyper important. Et après quand on part en vacances, on se tape dessus et on se dispute. D’ailleurs c’est marrant parce qu’on ne s’en rend même pas compte, ça se fait naturellement. Quand on se retrouve dans le cadre familial, on peut se courir après autour de la table alors que la veille on était en train de parler business. Ça c’est cool.

Comment as-tu rencontré Ninovella et B-so ?

Ninovella vient de Cholet aussi, on s’est rencontrés au Conservatoire. J’en ai fait 7 ans et lui 10 ou plus même. Nino c’est un vrai musicien. Il fait du piano, du synthé, de la guitare, tout ce que tu veux ! La discussion est plus facile quand on parle musique vu qu’on était tous les deux au conservatoire et ça se voit. Nino a une production presque infinie, contrairement à d’autres beatmaker. On s’est connu il y a 8 ans je crois, on a commencé ensemble. On est allé chez lui, on a fait quelques sons: mon premier EP “Rêve de Gamin”, puis “Dans le Vide”, et “Feel Alone”, “Pop Corn”, “Let Me Love”, “Smile”…

Et B-so, on s’est rencontré après Feel Alone, c’est mon attaché de presse qui me l’a présenté. Moi j’aime bien les gens qui ont des good vibes, et lui en 4 secondes je l’avais capté (rires)! Et depuis, il est dans tous les plus gros concerts et les plus grosses galères.

Avec qui rêves-tu de partager la scène ?

Sincèrement, j’ai envie de dire ma petite sœur. Si un jour on partage la scène ensemble c’est qu’elle l’aura mérité et que je l’aurai mérité en retour. Ce serait un bel accomplissement.

Après, en rêve d’artiste confirmé, ce serait Ed Sheeran! Un accomplissement total! Le lendemain, je pourrai arrêter la musique (rires)!

Quel est LE titre que tu n’enlèveras jamais d’une setlist ?

Au vu du public, ce serait Pop Corn parce que c’est mon plus gros succès et que j’en suis très fier. Des fois, certains artistes n’assument pas leur plus gros tube. Après, peut-être que dans 10 ans Pop Corn ne me correspondra plus mais je ne pense pas, quand j’écoute les paroles, ça me touche encore car c’est toujours moi. Ça n’a pas bougé. Je l’ai fait dans ma chambre avec Nino donc il n’y a pas plus pur. Il n’y avait aucun directeur artistique, aucun chef de projet, aucune deadline derrière.  Pratiquement tout le premier album est comme ça.

En ce qui concerne le deuxième album, si je continue à faire de la musique et d’autres albums, je pense que je garderai « Étoile » et « Succès » car je les aime beaucoup.

Pour finir, un mot pour la Boosteam ?

La Boosteam, c’est une grande et belle histoire, qui a commencé dès le début. C’est énorme car je n’aurai jamais pensé avoir une fanbase un jour. Je ne pensais pas que des gens allaient autant s’intéresser à ma musique donc quand c’est arrivé j’étais déjà mort de rire, mais surtout content, honoré et touché. C’est gratifiant. D’un côté, je sais ce que c’est d’être fan, je l’ai été aussi, ça va, ça vient. Je sais que la Boosteam se dira dans 20 ans « c’est vrai que j’étais fan de Boostee, truc de fou ! ». Mais d’un autre côté, quand je suis parti 6 mois, sans donner aucune nouvelle, et que je suis revenu et que j’ai vu que tout le monde était encore là, là j’ai réalisé que ce n’était vraiment pas superficiel, c’était vrai et les gens qui étaient là aimaient vraiment ma musique et pas juste parce que je passais sur trois ondes radios en même temps. J’avais besoin de me recentrer sur moi-même et de me concentrer pour le deuxième album. En revenant, j’ai balancé MAD et la vague a tout de suite suivi. Je considérai la Boosteam bien avant mais j’ai vraiment compris que c’était durable. Quand je vois les streams sur les plateformes je trouve ça fou aussi. La Boosteam a fait beaucoup de choses pour le projet, notamment dans le harcèlement de certaines télés ou de radios. On a vraiment réussi à passer des caps ensemble. Je veux vraiment qu’il n’y ait aucune barrière et que la Boosteam ce soit un mouvement. C’est un mot pour dire qu’on aime la musique de Boostee, tout simplement. Et ça, ça appartient à qui le veut bien. C’est du bonheur. Gros big up à la Boosteam.

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Chronique album / Live report