Milk and Green, l’alliance osée du nouveau label Nueva Onda Records

Mamusicale a eu la chance de rencontrer Arnaud Fradin de Malted Milk, et Toni Green, la diva de la soul, originaire de Memphis.
Avant de nous intéresser au projet Milk and Green, faisons connaissance avec Malted Milk.

Comment es-tu arrivé à la musique?

Arnaud : je me suis intéressé à la musique un peu par hasard en écoutant Bob Dylan et la musique américaine et rapidement vers 14 15 ans le père d’un ami de collège m’a offert un vinyle de Lightning Hopkins, un grand bluesman traditionnel, et j’ai eu le déclic. J’essayais de reproduire au chant et à la guitare ce que j’entendais. J’ai appris la guitare tout seul et au bout de 6 mois j’ai commencé à faire des concerts et à intégrer un groupe nantais avec des musiciens plus vieux que moi et avec plus d’expérience. Cette passion pour le blues s’est développée petit à petit. Pendant 10 ans je ne jouais que du blues traditionnel en me produisant dans des bars. Puis après avoir eu mon bac, j’ai vraiment commencé à en faire mon métier. Ça ne s’est jamais arrêté depuis et ça fait maintenant 25 ans que je fais de la musique et des concerts.

Comment est né le groupe Malted Milk?

Arnaud : au départ Malted Milk était un duo harmonica, guitare/chant. Malted Milk est un titre de Robert Johnson qui est très vite devenu une référence pour moi. Je jouais beaucoup de ses morceaux. Plus tard, le duo est devenu un quartet avec plus de blues électrique, puis est venue la soul. Il y a eu aussi la rencontre avec des musiciens américains, et différents chanteurs qui m’ont aiguillé vers des choses que je connaissais moins et surtout basées sur la voix. Ensuite on a introduit des cuivres qui sont là depuis 5 ans maintenant.

Qui a eu l’idée de collaborer avec Toni Green?

Arnaud : l’idée est venue de notre tourneur, Jean-Hervé Michel, avec qui on travaille depuis 4 ans maintenant et qui voulait un album un peu différent. Il a évoqué l’idée de travailler avec une chanteuse ou un chanteur. Jean-Hervé, était en contact avec Sébastian Danchin qui est lui-même directeur artistique du Paris Jazz Festival et directeur du festival de Jazz à Nice, et qui est en relation depuis longtemps avec Memphis.
Toni : j’ai rencontré Sebastian il y a un an environ à Memphis et il m’a réellement parlé du projet. Mais je le connais depuis 15 ans environ. Il avait été très impressionné par ma voix lors d’un concert à l’époque. Il a toujours voulu faire quelque chose avec moi.

Arnaud : Sebastian avait en tête depuis longtemps de faire quelque chose avec Toni, et en a parlé à Jean-Hervé il y a quelques années. L’idée a germé petit à petit, puis ça concordait avec le nouveau projet qu’on voulait faire, et avec le nouveau label Nueva Onda Records, qui a voulu être coproducteur, et investir sur ce projet. Sébastian, connaissant très bien cette culture, a été présent pour les 1ères rencontres avec Toni. En tant que directeur artistique, il était là en studio pour collaborer aux textes et surtout nous aider à communiquer entre nous.

Toni, qu’est ce qui t’a motivé à participer au projet?

Toni : après avoir écouté les CD de Malted Milk, je les ai trouvés très talentueux, et Sebastian m’a parlé avec un tel engouement de ce projet que ça m’a réellement intéressée d’y participer. Et je me suis dit, prend cette chance et voyons ce qui se passe ensuite.

Comment se sont déroulées les compositions pour ce CD?

Arnaud : en novembre 2013, on avait déjà l’idée de ce projet qui était en marche et on a commencé à composer de notre côté pour proposer des chansons à Toni. Elle nous a donné des avis très positifs et puis on a calé une semaine de résidence à Nantes en janvier 2014, dans l’objectif d’aboutir à des choses dont on avait discuté avec Toni, et aussi écrire des morceaux sur place. A la fin de ces 6 jours, on a fait un concert à Nantes, lors des Biennales Internationales du Spectacle (BIS), qui réunit beaucoup de programmateurs et de gens de la profession. C’était un peu stressant parce qu’au départ on n’était là que pour préparer un disque, et finalement on a passé un super moment sur scène. Lorsque Toni est ensuite repartie aux Etats-Unis, on a beaucoup échangé par internet.

Puis Toni est revenue pour les Victoires du Jazz et là on en a profité pour terminer les voix.

Lors de tes différents voyages et concerts aux Etats-Unis, y a-t-il un événement ou une rencontre qui t’a particulièrement marqué?

Arnaud : je suis allé de nombreuses fois aux Etats-Unis mais la première fois j’avais 21 ans. Je suis parti seul pendant 2 mois et ça a été une belle expérience et un voyage très riche car j’ai rencontré beaucoup d’artistes noirs américains pour la plupart de la Nouvelle Orléans. Et depuis ce temps-là j’y vais souvent. L’évènement le plus marquant récemment c’est mon voyage à Memphis courant octobre. Le directeur du Cahors Blues Festival organisait un voyage avec 20 personnes qui partaient faire la route du blues de Chicago à la Nouvelle-Orléans et ils m’ont appelé pour me proposer de les rejoindre sur 10 jours à Memphis et descendre ensuite dans le Mississippi. J’ai d’ailleurs retrouvé Toni à Memphis le 1er jour pour faire des “bœufs” dans les bars avec des musiciens locaux. J’ai eu la chance de rencontrer des supers chanteurs comme Chilly Bill. C’était très amusant de voir Toni dans son élément. Et durant ce voyage j’ai trouvé les racines de cette musique que je joue, et ça a été des moments très forts. Un moment particulièrement touchant également lorsque j’ai assisté à une messe gospel. Ça avait une signification pour moi. J’ai le sentiment que je devais faire ce voyage maintenant que je travaille avec Toni, ça crée une connexion. C’est un voyage qui m’a beaucoup ému. Car pour comprendre la musique que tu joues il faut que tu ailles dans le pays d’où elle vient. Ce sont les vraies racines de la musique. C’est un peu dans la lignée des choses.
En rencontrant Toni et à la suite de mes voyages aux Etats-Unis je me suis rendu compte à Memphis que tout ça été mêlé et que les chanteurs de soul jouaient aussi bien avec des musiciens de blues que des chanteurs de gospel. C’est une histoire commune. Quand j’écoute Mavis Staples ou les Stapels Singers ce sont des artistes qui ont une couleur blues avec du gospel et de la soul, même si chaque style porte son propre message. C’est pour ça qu’aujourd’hui on présente cet album avec Toni. Je trouve que c’est très important quand on joue un style de musique de bien connaitre l’histoire. L’idée maintenant serait de partir là-bas avec tous les membres du groupe.

Toni : Il y a des groupes qui essaient de copier ce style de musique mais Malted Milk a vraiment compris la culture de cette musique et sa profondeur. Nous sommes nés avec cette musique en nous. Notre héritage commence à la naissance. Où que tu ailles, quoi que tu fasses tu ne peux pas y échapper. Un musicien avec qui je vais travailler doit avoir le même état d’esprit que moi. S’il n’a pas la musique en lui, dans son cœur, dans sa tête, cela ne fonctionnera pas, et peu importe sa couleur de peau. L’expérience d’Arnaud vient du fait qu’il a travaillé avec des groupes différents. Il a traversé plusieurs mouvements musicaux et c’est ce qui l’a aidé à se renouveler et à évoluer. J’ai entendu de la vrai soul quand j’ai entendu sa musique, et c’est grâce à ce qu’il a traversé dans sa vie qu’il est arrivé à évoluer de la sorte. Tu ne peux pas t’empêcher de ressentir de la joie quand tu l’écoutes. Tous ne sont pas choisis pour arriver à ce niveau, seulement quelques-uns. Si tu as la chance de faire partie des élus, tu ne pourras jamais t’en détacher. Maintenant, grâce à cette évolution nous pouvons enfin collaborer. J’ai attendu longtemps de pouvoir trouver quelqu’un de la sorte avec qui travailler. Quand tu trouves enfin cette personne avec qui tu as tant de choses en commun, la collaboration devient formidable. Et ce que nous créons ensemble, personne ne peux l’effacer.

Avez-vous prévu de faire des concerts aux Etats-Unis avec ce CD?

Arnaud : on espère, mais c’est très complexe de jouer aux Etats-Unis pour des étrangers. On va voir si le CD est distribué là-bas et s’il y a des opportunités. Pour l’instant c’est plus facile que Toni vienne en France pour que nous puissions jouer ici et en Europe, dans un premier temps.

Vous avez monté, avec Toni, un projet éducatif au Collège de Gassicourt à Mantes-la-Jolie, peux-tu nous en parler?

Arnaud : c’était très émouvant de travailler avec ces jeunes dont certains étaient en échec scolaire. Si on peut donner envie aux enfants qui n’ont pas beaucoup d’intérêt pour l’école, de faire de la musique, c’est déjà énorme. J’ai beaucoup échangé avec eux, je leur ai joué ma musique et je leur ai beaucoup parlé de mon métier et de ma passion. Le but était aussi de leur montrer tout le travail et l’implication qu’il y a en amont pour faire un disque et pas seulement être diffuser sur les réseaux sociaux. Toni est venue nous rejoindre à la fin des interventions, et on a fait un petit concert tous ensembles en fin d’année. Toni a donné une dynamique très forte au groupe.
Toni : j’ai été très fière de participer à ce projet car les enfants étaient très motivés pour ce concert qu’on a fait ensemble à la fin.

Quelle est votre actualité à venir?

Arnaud : on a quelques concerts de prévus dans les mois à venir. On a aussi l’idée d’organiser des ateliers de gospel à Nantes sur 2015 avec Toni. C’est d’ailleurs une envie de sa part.

Merci à Toni et Arnaud de m’avoir si gentiment reçue.

Toni : je voulais juste remercier Mamusicale pour cette opportunité de faire partager ce projet, en espérant qu’il y en aura d’autres tout aussi beaux.

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